Ils
suivaient les traces creusées par les Doigts depuis les temps
où le paysage n'était encore qu'un point où
tout résidait à l'état d'espoir. Au fond
d'eux, ils portaient ce point toujours enfoui, et chacun
un monde contenait l'espoir initial, ses premiers pas, ses
premiers genoux écorchés, ses plus beaux rêves d'enfant,
les premières gifles blessantes qui font rétrécir
le monde ; ils avaient en eux les élans et les répressions
brutales, la boue indifférenciée qui n'est rien qu'un
magma sans nom attendant le déroulement d'un rêve
; ils avaient toutes les formes, froissées à l'état
de ftus, et la force de les faire grandir, toutes les directions,
et une voix secrète pour leur indiquer laquelle suivre ; ils
avaient des corps pour les aider dans leur univers de formes. Et ils
pouvaient encore maîtriser la densité des lignes, passer
leurs doigts dans les choses pour les faire parler ou les apaiser, les
faire croître ou dormir. Ils écoutaient encore en eux et
autour la voix claire du centre.